Actualité : « Le bras de fer avec l’industrie pornographique est révélateur ». C’est ce qu’explique cette semaine dans La Croix, le patron du gendarme des médias, l’ARCOM (ex CSA).
1) Un combat de longue haleine.
Depuis le 11 janvier, les sites pornographiques basés en France et hors de l’Union européenne doivent vérifier l’âge de leurs utilisateurs. Sous peine d’être bloqués par l’ARCOM (l’Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique) . Roch-Olivier Maistre, qui achève son mandat à la tête de cette instance, revient sur ce combat de longue haleine.
Il rappelle notamment que pour les jeunes en ligne, une pièce d’identité est nécessaire pour vérifier que la personne est bien majeure, même si la CNIL n’en a pas voulu… Un premier filtre, avec la carte bancaire paiement zéro euros, sera viable dès le mois d’avril.
La Croix : Depuis le 11 janvier, l’ARCOM peut mettre en demeure puis bloquer les sites pornographiques qui ne s’assurent pas que leurs utilisateurs ont plus de 18 ans. Cela fait pourtant plus de trente ans que le code pénal interdit l’exposition des mineurs à ce type de contenus. Pourquoi cela a-t-il pris tant de temps ?
Roch-Olivier Maistre : Pendant longtemps, l’accès à la pornographie était circonscrit aux revues, du cinéma X… Puis l’offre s’est déplacée sur Internet et est devenue colossale, sans aucune barrière à l’entrée : vous déclarez que vous avez 18 ans et vous avez accès à ces contenus. Le législateur s’est saisi du problème avec la loi sur les violences familiales de 2020. Mais on s’est heurté à une bataille judiciaire sans fin, qui nous a fait prendre la mesure de la puissance de l’industrie pornographique. La multiplication des contentieux a poussé la France à revisiter sa législation. La loi pour sécuriser et réguler l’espace numérique (SREN) a été adoptée en mai 2024. Elle oblige les sites à déployer un dispositif permettant de s’assurer que la personne qui se connecte est bien majeure.
2) gain de temps en procédures
La Croix : L’ARCOM a-t-elle déjà commencé à bloquer certains sites ?
R.-O. M. : Depuis quelques jours, nos agents sont assermentés. Comme le prévoit la loi, la procédure sera la suivante : en fonction des constats qu’elle aura réalisés, l’Arcom enverra au site concerné une première lettre d’observations. Quinze jours après, si rien n’a bougé, ce sera une lettre de mise en demeure. Et si après un nouveau délai de quinze jours, le site ne se conforme toujours pas à la législation, l’Arcom pourra ordonner directement son blocage. Cette décision sera bien prise sous le contrôle du juge – elle pourra donc être contestée devant la justice –, mais le blocage pourra prendre effet immédiatement. On gagne donc beaucoup de temps en termes de procédure. Ces règles s’appliquent d’ores et déjà aux sites implantés en France et en dehors de l’UE. Pour les sites européens (pour beaucoup à Chypre et en République tchèque), la mécanique s’enclenchera en mai.
La Croix : À quels critères techniques devront répondre ces outils de vérification d’âge ?
R.-O. M. : Nous les avons fixés dans un référentiel publié en octobre 2024 et bâti avec la Commission nationale de l’informatique et des libertés Martin Ajdari, prochain président de l’Arcom (Cnil). Le principe est celui du double anonymat : donner la garantie que l’utilisateur est majeur sans pour autant permettre au site de savoir qui il est et d’avoir accès à ses données. Pour les jeux en ligne, on peut fournir sa carte d’identité, mais la Cnil ne voulait pas que ce soit possible pour les sites pornographiques, par respect pour la vie privée. On le voit, l’imagination technique est là. Une start-up française installée à Montpellier arrive par exemple à garantir l’âge rien qu’en regardant les mouvements de la main ! Tout un marché de la vérification de l’âge s’est développé ces derniers mois. Les sites ne peuvent plus se retrancher derrière l’absence de solution technique. Jusqu’en avril, l’Arcom tolérera toutefois le recours à la carte bancaire, avec une transaction à 0 euro. Cela crée un premier filtre.
3) un défi colossal
La Croix : Cela va-t-il en rayer la consommation de pornographie chez les jeunes ?
R.-O. M. : C’est le but, même si on ne doute pas qu’il y aura de nouveaux contentieux. Nous sommes en tout cas en dialogue avec la Commission européenne. En effet, d’ici juin ou juillet, elle devrait aussi proposer une démarche de vérification d’âge pour le continent européen. Le dispositif devrait donc s’étendre progressivement aux autres pays de l’Union.
La Croix : Depuis 2023, l’Arcom est chargée de faire respecter, en France, le règlement européen sur les services numériques (DSA). Un texte parfois jugé inefficace, notamment pour protéger les jeunes des effets néfastes des réseaux sociaux…
R.-O. M.: Contrairement à la régulation des chaînes de télévision et de radio, qui existe depuis quarante ans, celle des grands acteurs du numérique est encore toute jeune. La télévision et la radio sont un monde fini. Or, si on signale un contenu problématique, l’Arcom le vérifie et intervient. Sur ces plateformes numériques, des centaines de millions de contenus sont véhiculées chaque seconde. La logique du DSA est donc différente. En effet, on impose un objectif politique aux plateformes. Celle de lutter contre les contenus illicites. Ensuite, elles doivent fournir des rapports de transparence et autoriser des signaleurs de confiance. L’an dernier, un premier beau succès a montré l’efficacité de cette réglementation. TikTok voulait déployer en Europe une application extrêmement addictive pour les jeunes. Car, TikTok Lite, avec un système de récompense, en fonction du temps passé sur la plateforme. Au vu des exigences de la Commission européenne, TikTok a préféré renoncer.
Concerné par cette addiction ? Ici l’écoute, la confiance et l’anonymat sont les maîtres-mots. N’hésite pas !
Dans son rapport d’octobre 2024, Chemsex, retour sur 15 ans d’usages de drogues en contexte sexuel, L’Observatoire français des drogues et des addictions (1) analyse l’usage des outils numériques et son influence sur les consommations de drogues, démontrant un lien avec la consommation de porno en ligne.
Par chemsex, on parle d’un ensemble de pratiques intriquant activité sexuelle et usage de produits psychoactifs, autrement dit, les drogues. De plus, les rencontres entre chemsexers s’appuient sur les réseaux sociaux et les applications de rencontres.
L’usage des outils numériques constitue une spécificité du chemsex en même temps qu’un facteur central de son développement. Celui-ci évolue toutefois depuis la fin des années 2000 où sont observés sur certains sites de rencontres les premiers profils divulguant des renseignements liés aux pratiques sexuelles et aux consommations de drogues (quelles substances consommées, à quelle fréquence, etc.) à côté d’autres informations personnelles (description physique, intérêts, etc.) (2).
À partir de cette période, les observateurs parisiens indiquent que les sites de rencontres favorisent l’accès aux substances de ceux qui ne fréquentent pas les lieux festifs gays (bar, club, backroom, etc.) et n’auraient, de ce fait, pas nécessairement consommé des substances psychoactives autrement (3).
Les références aux consommations de drogues restent toutefois discrètes et limitées du fait de la censure opérée par certains sites. Elles passent alors principalement par l’usage d’émoticônes et de messages codés mais suffisamment explicites pour les initiés (« plan planant », « plan perché », etc.).
À partir de 2012, le développement des applications de rencontres pour smartphone s’accompagne d’un affichage plus ostensible des références aux consommations de drogues. Les utilisateurs introduisent alors les expressions de « chems triage » puis « slam triage » pour désigner le choix du ou des partenaires en fonction des produits que l’on projette de consommer et/ou du mode de consommation privilégié (« slam triage » faisant référence à la recherche de pratiques d’injections mutuelles de produits).
La géolocalisation, facteur accélérant
La géolocalisation permise par ces applications favorise de surcroît l’immédiateté de la rencontre (4). Le choix des applications peut varier en fonction des intentions des chemsexers : certaines sont réputées spécialisées dans une série de pratiques sexuelles, d’autres plus indiquées pour la recherche de rencontres couplées à des consommations de drogues (5), quand d’autres encore apparaissent plus généralistes (6). Ces dernières années, la présence récurrente d’informations et d’échanges relatifs aux produits psychoactifs sur les applications de rencontre amène un nombre croissant d’utilisateurs à stipuler explicitement leur refus d’associer rencontres sexuelles et usages de substances et à afficher leur volonté de ne pas avoir affaire à des personnes consommatrices (en témoigne la multiplication des mentions « no drugs », « no chems », « no tox », « pas de toxico », etc.). Des réseaux sociaux comme Instagram ou X (anciennement Twitter) ou des systèmes de messagerie instantanée comme Messenger sont également investis par les chemsexers pour favoriser les rencontres ou, par exemple, partager des vidéos de sex parties.
Le chemsex à distance se développe
Le développement des pratiques de chemsex à distance, c’est-à-dire des personnes consommant des drogues, parfois par injection, et ayant des activités sexuelles par écran interposé, constitue une évolution marquante observée depuis 2015 et qui s’est développée durant les confinements et couvre-feux de 2020 et 2021 (8). Ces rencontres entre chemsexers interconnectés (qui peuvent n’être que deux ou plusieurs dizaines) s’effectuent souvent par le biais de plateformes de téléconférences (zoom, Skype notamment) ou de sites spécialisés. Certains d’entre eux intègrent des fonctions type slamtime où chaque personne souhaitant s’injecter en même temps que d’autres, ou souhaitant observer des pratiques d’injection, est informée du moment propice. En fonction des pays d’où sont originaires les participants, certains produits seront plus particulièrement consommés (par exemple l’injection de méthamphétamine chez les usagers américains ou allemands, alors que les cathinones n’y apparaîtront que rarement, contrairement aux usagers français) (9).
Des usagers rapportent également consommer des produits tout en visionnant des films pornographiques dans lesquels les acteurs sont également en train de faire usage de produits et parfois de les injecter. Les pratiques de chemsex à distance ont perduré chez une partie des chemsexers au-delà des périodes de confinement, soit parce qu’ils résident dans des zones éloignées des villes où s’organisent les sessions chemsex et/ou ne trouvent pas toujours de partenaires à proximité de leur lieu de vie, soit parce qu’ils y ont trouvé un intérêt spécifique comme le fait de ne pas avoir à « gérer » des interactions sociales. Pour certains, cette modalité du chemsex leur permet de maintenir des relations sexuelles en se préservant du rejet auquel ils redoutent d’être exposés sur les applications de rencontres en raison de leur âge avancé, par exemple.
Chemsex à distance : de nombreux risques aussi
Ces pratiques de chemsex à distance (parfois appelé « plan cam ») permettent une meilleure gestion de certains risques et préservent d’une partie des dommages. Elles permettent parfois de mieux maîtriser les consommations (gérer soi-même les moments de prises, les doses, etc.), d’annihiler les risques de contaminations d’infections sexuellement transmissibles (par partage de matériel ou par voie sexuelle) et les risques d’agressions ou de vol (10).
À l’inverse, le chemsex à distance peut renforcer les risques liés à l’usage solitaire de drogues, par exemple en cas de surdose, ainsi que le caractère compulsif des consommations qui ne s’arrêtent plus avec le départ des partenaires (les sites Internet sont fréquentés en permanence). Le coût financier de ces plateformes peut aussi mettre en difficulté des usagers précaires, d’autant plus lorsque les abonnements sont souscrits dans des moments de désinhibition importante et que certains oublient de les résilier par la suite.
Et toi, qu’en penses-tu ? Sais-tu qu’on peut en sortir ? Viens en discuter avec nous sur le chat’ ! (discussion anonyme et gratuite) :
(1) Groupement d’intérêt public créé en 1983 pour permettre le recueil, l’analyse, la diffusion, et la valorisation des données et des connaissances dans le domaine des addictions, y compris sur écran, ou des jeux.
Des fournisseurs d’accès à internet ont commencé à bloquer des sites porno accessibles en France mais hébergés en dehors de l’Union européenne, après une décision de justice liée au contrôle insuffisant ou inexistant de l’âge des utilisateurs.
Quatre sites pornographiques commencent à être bloqués ce vendredi en France par les fournisseurs d’accès à internet qui en ont reçu l’ordre de la justice, ont confirmé SFR, Bouygues, Orange et Free à l’AFP. Cependant, les principaux sites porno hébergés dans l’Union européenne restent accessibles.
Contrôle insuffisant
Les quatre sites en question – Xhamster, Tukif, Mrsexe et Iciporno – étaient visés par une décision de la cour d’appel de Paris rendue mi-octobre. Dans cette affaire, la justice française avait été saisie par deux associations de protection de l’enfance au sujet d’un contrôle insuffisant ou inexistant de l’âge des utilisateurs.
Statuant au sujet de plusieurs sites pornographiques, elle avait décidé du blocage des seuls hébergés en dehors de l’Union européenne. Dans sa décision, la cour d’appel avait considéré « l’intérêt supérieur de l’enfant » comme une « considération primordiale », justifiant de porter atteinte à « d’autres droits tels que la liberté d’expression ».
Une décision attendue à l’échelle de l’Union européenne
Le blocage des sites ordonné par la cour d’appel de Paris devrait se poursuivre « jusqu’à ce que soit démontrée la mise en œuvre par ces derniers d’un contrôle autre que purement déclaratif de ce que les utilisateurs sont majeurs », avait précisé la juridiction.
S’agissant des sites hébergés au sein de l’Union européenne, la justice française attendra une réponse de la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) pour rendre sa décision.
Selon le régulateur français de l’audiovisuel, l’Arcom 2,3 millions de mineurs visitent chaque mois des sites pornographiques. Dès 12 ans, plus de la moitié des garçons utilisant internet se rendent en moyenne chaque mois sur ces sites.
Cette première décision de bloquer 4 sites montre également qu’il est techniquement possible de bannir un site pornographique, à l’heure où l’addiction au porno devient un véritable problème de santé publique.
Le contrôle d’âge par carte bancaire ne serait pas une solution pour endiguer l’accès des mineurs au porno, selon l’organisation. Rappelons que selon le régulateur Arcom (ex CSA), 2,3 millions de mineurs visitent chaque mois des sites pornographiques. Dès 12 ans, plus de la moitié des garçons utilisant internet se rendent en moyenne chaque mois sur ces sites.
Étonnamment, alors que le paiement en ligne est aujourd’hui un système fiable, très répandu et éprouvé, la Fédération bancaire française (FBF) redoute un manque de protection des données des internautes, sur les sites pornographiques, si l’on installait un contrôle d’âge par carte bancaire, avec le paiement zéro, qui consiste à vérifier seulement la validité de la carte bleue. Et implique donc que les enfants s’en procurent une.
Le contrôle d’âge par carte bancaire, une solution pourtant jugée efficace
Pour éviter que des mineurs accèdent aux sites pornographiques, l’Arcom cherche à imposer des méthodes de contrôle : il propose donc, temporairement, – le temps qu’une autre solution technique soit disponible -, que les sites imposent d’entrer ses identifiants de carte bancaire au moment d’accéder au contenu. L’utilisateur ne serait pas facturé, mais prouverait ainsi posséder une carte bancaire, et supposément être en âge d’accéder aux sites pornographique. Une solution qui serait tout à fait efficace, selon bon nombre de spécialistes de l’informatique… quitte à faire chuter gravement l’audience de ces sites pornos ? Ce qui engendrerait de lourdes pertes financières pour cette industrie ?
Dans son référentiel adopté en octobre, pour lequel Commission nationale de l’informatique et des libertés (CNIL) a rendu un avis favorable, l’Arcom propose aux sites pornographiques, pendant une période transitoire de trois mois à partir de janvier 2025, de mettre en place ce système de vérification par carte bancaire «afin de protéger sans attendre les utilisateurs les plus jeunes. »
La question revient souvent : en 2024, plus de trente ans après le début de la démocratisation d’Internet, aucune solution ne serait possible pour protéger les enfants des sites pornographiques ? Comment donc contrôler efficacement l’âge des visionneurs sur les sites pornographiques ? Pas avec les cartes bancaires, répondent en cœur les établissements financiers réunis au sein de la Fédération bancaire française. Selon eux, cette solution proposée par l’Arcom serait peu efficace voire dangereuse, a-t-elle indiqué à l’AFP, confirmant une information de l’Informé.
Des raisons malicieuses ?
L’organisation professionnelle des banques françaises désapprouve donc ce contrôle d’âge par carte bancaire. Pour quelles raisons ? D’abord, parce que cette solution ne serait pas efficace pour discriminer les mineurs, estime-t-elle : 1,4 million d’entre eux ont une carte bancaire, et pourraient donc passer outre ce contrôle. Quid du million de mineurs restant et consommant du porno chaque mois ?
Surtout, ce « recours à la carte bancaire présente des risques d’hameçonnage des cartes bancaires sur des sites qui, depuis plus de trente ans, ne respectent pas la loi pour la protection des mineurs », rappelle la FBF. Autrement dit : des sites qui ne respectent déjà pas la loi peuvent manquer de fiabilité dans leur collecte de données de carte bancaire. L’argument est un peu malicieux, puisque théoriquement, il est possible de fermer n’importe quel site qui ne respecte pas la loi, quelle qu’elle soit, par le biais de son hébergeur. D’autant plus malicieux que les grandes plateformes de porno qui ont pignon sur web semblent tout à fait en règle sur cette fameuse loi pour la protection des mineurs. Surtout, elles concentrent à elles seules 80% des sites pornos (y compris en France avec des plateformes comme ****hub), ainsi que l’indiquait le chercheur britannique Tom Farr : « actuellement, la méga-entreprise derrière le rideau du porno est Mindgeek , un conglomérat international qui possède plus de 80 % des sites pornographiques » (1).
Certains sites “peu scrupuleux” ?
Toujours selon l’organisation, certains sites peu scrupuleux pourraient profiter de ces contrôles pour détourner les cartes bancaires et réaliser des transactions à l’insu de leur propriétaire. Des sites peu scrupuleux dans l’univers de l’industrie du porno ? Effectivement, le risque de piratage existe toujours… même chez les grandes multinationales ! Et si c’était justement une manière de stopper l’activité des sites porno peu scrupuleux ?
L’Observatoire de la sécurité des moyens de paiement, dirigé par la Banque de France, recommandait aussi en septembre dernier d’être «extrêmement sélectif et vigilant » avant d’enregistrer son numéro de carte en ligne, rappelle la Fédération bancaire. En effet, au delà des mineurs, il ne faudrait pas qu’Ursula se rende compte que son mari Anatole surfe régulièrement sur un site porno !
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Chemsex : Sexe, drogue et dépendance dresse le portrait intime d’Aubin, un jeune chemsexeur de 24 ans.
Pendant un an, la caméra le suit dans son parcours pour se soigner. Rythmé par ses rendez-vous avec son addictologue, Hélène Donnadieu, chef de service au CHU de Montpellier, décortique le cercle infernal : « Il y a d’une part des substances très puissantes avec une durée d’action très courte. Et d’autre part, les applis de rencontre [géolocalisées à but sexuel, du type Grindr]. Ces substances vont créer un désir incessant de rencontrer, avoir des rapports sexuels, durer, performer. L’appli permet d’avoir le plan d’après. »
« J’ai perdu le contrôle de ma vie »
Assis sur son lit, il tourne les pages de son journal intime. Ouvrir celui de 2021-2022 est difficile. Il habite à Paris depuis 2019. Au fil des fêtes, des week-ends sans dormir, « j’ai perdu le contrôle de ma vie », dit-il. Retour à Montpellier, après deux tentatives de suicide. Le film raconte cette spirale de l’addiction, le dégoût de soi, les comportements à risque : « Tu ne sais plus te poser des limites, tu fais des trucs de malade ou tu laisses les autres te faire des trucs de malade »
A son parcours se mêle celui d’autres chemsexeurs. Souvent très jeunes, de 19 à 22 ans, ils incarnent une nouvelle génération de consommateurs que le covid a laissé désœuvrée et désenchantée, à la recherche d’émotions fortes via les drogues de synthèse et le sexe à outrance.
Comme pour Aubin et d’autres jeunes hommes rencontrés par les deux réalisateurs, le chemsex vient combler des manques, la difficulté d’accepter son homosexualité parfois. Aubin n’a pas reçu d’amour de ses parents. D’ailleurs, il ne leur parle plus. Son père était violent et le considérait comme une « tantouze », sa mère était persuadée qu’il était possédé « par une entité démoniaque ». Heureusement, Anaïs, sa sœur, est toujours là.
« J’ai envie de vivre », confie néanmoins Aubin. C’est alors un voyage vers la lumière qu’entame le jeune homme sous le regard bienveillant des deux réalisateurs.De périodes d’abstinence en rechutes, c’est un chemin semé d’obstacles. Aubin parviendra-t-il à « remonter à la surface » ?
De fait, comme la dépendance au porno, la dépendance au chemsex est une addiction dont il est difficile de sortir et qui conduit à des comportements à hauts risques pour la santé physique et mentale. Il important d’en connaître les dangers et ce documentaire peut vous y aider.
Sur le même sujet, l’analyse de La Sélection du Jour (LSDJ) :
Chemsex, le cocktail destructeur de la drogue et du sexe (C8 – 2min30) :
Et toi, es-tu victime de la dépendance au chemsex ? Viens en discuter avec nous sur le chat’ ! (discussion anonyme et gratuite)
Le chemsex, c’est quoi ? Qui est concerné ? Comment se développe-t-il ? Revue en détails cette pratique à hauts risques qui peut aussi provenir d’une addiction à la pornographie, comme l’avait déjà souligné l’Académie de médecine en 2023.
Le chemsex est une pratique sexuelle à hauts risques dans laquelle les partenaires se droguent pour décupler leurs sensations, augmenter leurs performances sexuelles et se désinhiber. Une étude de l’Observatoire français des drogues et des tendances addictives (OFDT), parue en octobre 2024, dresse un bilan sur l’évolution du chemsex depuis quinze ans.
Qui concerne-t-il en France aujourd’hui ? Surtout pratiqué en clubs et milieux festifs avant 2010, le chemsex a basculé dans la sphère privée, particulièrement chez les particuliers. Par ailleurs, le « chem’s » concerne surtout les hommes ayant des relations sexuelles avec d’autres hommes (HSH) : 13 à 14 % d’entre eux ont eu ce genre de rapport l’an passé, dont 5 à 7 % lors de leur dernier rapport sexuel. Les milieux libertins (hétéros, bi…) ou d’autres pratiques individuelles y ont aussi recours.
Comment se développe le chemsex ?
La pratique du chemsex bénéficie d’une promotion quasi généralisée, qui passe aussi par les réseaux sociaux, la télévision ou les applications mobiles. Elle est même souvent expliquée en détails et encouragée.
Établir des chiffres précis reste complexe car la détention et l’usage de drogue sont illégaux : les consommateurs se cachent. Pour les seuls HSH, ils seraient entre 100 000 et 200 000 personnes selon un rapport remis au Ministre de la Santé en 2022. Le bilan de l’OFDT fait état d’une croissance rapide, notamment chez les très jeunes dont c’est parfois la première expérience sexuelle. Cette réalité est déjà si importante que la Mutuelle étudiante propose déjà une prévention.
Au cœur du processus, l’accès facilité aux substances illicites est un facteur aggravant. Il est même déconcertant de voir avec quelle facilité les “chemsexeurs” se procurent leurs cocktails explosifs. L’enquête menée par France 3 AURA le prouve : commander en ligne et se faire livrer à des prix dérisoires est un jeu d’enfant. Au « menu » : du GBL (le gameux GHB), des cathinones (dont la 3-MMC est le produit phare) et plus récemment, la kétamine utilisée pour le slam, des injections de cocktails drogues/dopants sexuels. Leur commerce alimente toute une économie souterraine contre laquelle il est devenu très difficile de lutter (2).
Pourtant, il existe des solutions pour en sortir.
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Le documentaire complet ci-dessous : Chems’, plongée dans la spirale du sexe et de la dépendance
Notes
(1) Le chemsex, pratique illégale qui ravage des vies : une synthèse de Corentin Rahier pour La Sélection du Jour, librement adaptée pour SOSporno.net. Article à retrouver dans son intégralité sur LSDJ.
Quels sont les dangers du chemsex et quelles sont les conséquences pour la santé physique et mentale ? Comment s’en sortir ? Une pratique à hauts risques qui peut aussi provenir d’une addiction à la pornographie.
Le chemsex, bien qu’illégale, est une pratique du sexe sous stupéfiants fait de plus en plus souvent parler de lui, notamment en raison de ses dangers pour la santé physique et mentale. Elle se répand en particulier chez les jeunes liés à la communauté gay et fait de nombreuses victimes chez les « chemsexeurs ». Analyse d’un processus entre addictions, accidents et décès.
Le 10 février 2023, la pratique du chemsex éclate au grand jour en France : elle est sous le feu des projecteurs avec la tempête médiatique de Pierre Palmade, inculpé pour homicide involontaire lors d’un accident de voiture sous emprise de stupéfiants, et probablement après une soirée chemsex. Son procès, qui a début le 20 novembre dernier, tranchera, mais le comédien avait déjà été mentionné dans un dossier chemsex peu de temps auparavant. Le chemsex, un fléau caché mais ravageur, comme l’explique le Figaro.
Dans le chemsex, les prises sont intrinsèquement liées à des pratiques sexuelles débridées. On cherche à « planer » pour se désinhiber et oublier les risques de MST (Maladies Sexuellement Transmissibles), IST (Infections Sexuellement Transmissibles) et VIH en s’adonnant à des partouzes et à des pratiques “hard”… Certains dispositifs médicaux encouragent malgré eux cette mise en danger : c’est le cas de la PrEP, une prévention au sida que de plus en plus de HSH (Hommes ayant des relations Sexuelles avec des Hommes) utilisent pour se passer de préservatifs lors des rapports.
Au-delà des risques sanitaires, les conséquences sont aussi graves sur les plans physiques et psychologiques. Le risque le plus important est celui de l’addiction, comme avec la pornographie. Le sexe et le contexte social sont des portes d’entrées à la consommation mais cela peut devenir une dépendance dont la personne ne sait se séparer et qui oblige la personne à recommencer, souvent même contre sa volonté. Exactement comme avec le porno, le plaisir sexuel étant la clef du circuit de la récompense.
Des conséquences dramatiques pour la santé physique et mentale
Dans les divers problèmes rencontrés, il y a d’abord le “bad”, qui est la chute post-euphorie, après la récompense : un mélange de tristesse suicidaire et de maux physiques (douleurs de ventre, fièvre, frissons etc.). Ensuite viennent l’absence de productivité et l’hébétude. Il faut malheureusement préciser que les “marathons” chemsex peuvent durer jusqu’à 3-4 jours sans repos et sans autre alimentation que la drogue ou presque !
La notion du temps disparaît et le retour au réel s’accompagne d’un tel épuisement que plusieurs consomment alors de la drogue pour « tenir », incapables de reprendre sinon le cours de leur vie. La perte de leurs moyens peut devenir permanente et travailler, conduire ou interagir avec les autres se fait toujours sous l’emprise de produits. Ils sont un danger pour les autres en plus d’eux-mêmes (cf. l’affaire Palmade), parfois jusqu’à mort d’êtres humains! Le cas du conjoint de Jean-Luc Romero a fait du bruit, mais beaucoup d’autres décès ne sont pas relayés par la presse.
Comment s’en sortir ?
Pour endiguer le phénomène et sortir du chemsex, des suivis en addictologie existent, ainsi que des lieux de cure de désintoxication. Des associations se mobilisent. On peut en sortir ! Mais en revenir est un véritable parcours du combattant, dans lequel la personne addict au chemsex doit accepter de voir la réalité de son addiction et de se faire aider. Les rechutes sont nombreuses et souvent décourageantes, en raison de l’annihilation de la volonté du patient.
Dans le documentaire ci-dessous, le témoignage d’Aubin résume ses enjeux. Comme lui, de plus en plus de victimes du phénomène prennent la parole pour sensibiliser et éviter cet enfer à d’autres. Les jeunes accros au chemsex ont parfois débuté en fin de collège une dépendance qui dure plusieurs années ! Mais la bonne nouvelle, encore une fois, est qu’on peut en sortir.
Et toi, qu’en penses-tu ? Viens en discuter avec nous sur le chat’ ! (discussion anonyme et gratuite)
Le documentaire complet ci-dessous : Chems’, plongée dans la spirale du sexe et de la dépendance
Notes
(1) Le chemsex, pratique illégale qui ravage des vies : une synthèse de Corentin Rahier pour La Sélection du Jour, librement adaptée pour SOSporno.net. Article à retrouver dans son intégralité sur LSDJ.
Selon le pape François, le porno sape le plaisir sexuel : c’est une satisfaction sans relation qui peut engendrer des formes d’addiction.
A Rome lors de l’Audience générale du mercredi 17 janvier 2024, le Pape François a poursuivi son cycle de catéchèse sur les “vices et les vertus”, en mettant l’accent sur la luxure, “un vice particulièrement odieux” qui peut selon lui dévaster la relation entre les personnes. Le pape a ainsi qualifié le vice de la gourmandise de “démon toujours tapi à la porte du cœur” et de “sorte de voracité envers une autre personne”, c’est-à-dire “le lien empoisonné entre les êtres humains, surtout dans le domaine de la sexualité”.
“Le christianisme ne condamne pas l’instinct sexuel”
Le pape a expliqué que dans le christianisme, “l’instinct sexuel n’est pas condamné”, tout en mettant en garde contre les dangers, alors qu’il demeure une “belle dimension sexuelle et de l’amour”. Le pape François a qualifié l’expérience amoureuse de “mystère” et l’une des “réalités les plus étonnantes de l’existence”. Il a ensuite souligné que “si l’amour n’est pas contaminé par le vice, l’amour est l’un des sentiments les plus purs”, car la personne amoureuse “cesse de penser à elle-même pour se projeter complètement vers l’autre”, devenant ainsi “un amour inconditionnel et sans raison”.
“Patience si cet amour, aussi puissant soit-il, est aussi un peu naïf : l’amoureux ne connaît pas vraiment le visage de l’autre, il a tendance à l’idéaliser, il est prêt à faire des promesses dont il ne comprend pas immédiatement le poids”.
L’amour contaminé par le démon de la luxure : le manque de chasteté
“Cette ‘jungle’ où se multiplient les merveilles n’est cependant pas à l’abri du mal. Elle est contaminée par le démon de la luxure, et ce vice est particulièrement odieux”, a précisé le pape. Plus tard, le Saint-Père a expliqué que cette “contamination” détruit les relations entre les personnes : “Combien de relations qui ont commencé de la meilleure manière se sont ensuite transformées en relations toxiques, de possession de l’autre, dépourvues de respect et de sens des limites ?”, s’est-il demandé.
“Il s’agit d’amours où la chasteté a fait défaut : une vertu à ne pas confondre avec l’abstinence sexuelle. La chasteté est autre chose que l’abstinence sexuelle, elle est liée à la volonté de ne jamais posséder l’autre”. Pour François, “aimer, c’est respecter l’autre, chercher son bonheur, cultiver l’empathie pour ses sentiments, se mettre à connaître un corps, une psychologie et une âme qui ne sont pas les nôtres, et qu’il faut contempler pour leur beauté”. Cependant, le locataire n °1 du Vatican a précisé que “la luxure se moque de tout cela : elle pille, vole, consomme rapidement, ne veut pas écouter l’autre, mais seulement satisfaire ses propres besoins et plaisirs ; la luxure considère toute courtoisie comme ennuyeuse, ne recherche pas cette synthèse entre raison, pulsion et sentiment qui nous aiderait à mener sagement notre existence”.
Et de souligner : “Le luxurieux ne cherche que des raccourcis : il ne comprend pas que le chemin de l’amour doit être parcouru lentement, et cette patience, loin d’être synonyme d’ennui, nous permet de rendre nos relations amoureuses heureuses”.
Le don du plaisir sexuel sapé par la pornographie
Le pape a souligné que “parmi tous les plaisirs de l’homme, la sexualité a une voix puissante”, car “elle implique tous les sens ; elle habite à la fois le corps et l’esprit”. “C’est magnifique, mais s’il n’est pas discipliné avec patience, s’il n’est pas inscrit dans une relation et une histoire où deux individus le transforment en une danse amoureuse, il devient une chaîne qui prive l’homme de sa liberté”.
Il a également souligné que “le plaisir sexuel, qui est un don de Dieu, est sapé par la pornographie : une satisfaction sans relation qui peut engendrer des formes d’addiction”. À cet égard, il a affirmé que “nous devons défendre l’amour de l’esprit, du corps, l’amour pur de se donner l’un à l’autre, et c’est la beauté de la relation sexuelle”.
Gagner la bataille contre la luxure et la déshumanisation de l’autre
À la fin de sa catéchèse, le Saint Père a souligné que “gagner la bataille contre la luxure, contre la déshumanisation de l’autre, peut être un engagement qui dure toute la vie”. Enfin, le pape François a assuré que “le prix de cette bataille est le plus important de tous, car il s’agit de préserver la beauté que Dieu a inscrite dans sa création lorsque l’amour entre l’homme et la femme a été imaginé, non pas pour s’utiliser mutuellement, mais pour s’aimer”.
Et toi, qu’en penses-tu ? Pour toi, la pornographie, c’est quoi ? Viens en discuter sur le chat’ ! (discussion anonyme et gratuite)
Sound of freedom, véritable #Metoo de l’enfance : une tribune de Jean-Baptiste Maillard, qui a vu le film hier soir, jour de sa sortie.
Avertissement préalable : Sound of freedom n’est pas complotiste et ne parle pas de politique, ce n’est pas un documentaire mais une fiction inspirée d’une histoire vraie.
Bouleversant, sans fausse note, ni voyeurisme ou images glauques ou malsaines : quoiqu’en disent les critiques qui surjouent les vierges effarouchées, Sound of Freedom est un film très émouvant, au scénario parfaitement ficelée et digne des meilleurs thrillers hollywoodiens, où l’on rit parfois, avec un excellent jeu d’acteurs. Mais le sujet est grave : c’est sans doute là que ça coince un peu, beaucoup, voire même à la folie ?
Traiter de l’esclavage est toujours délicat. Davantage encore lorsque celui-ci nous est contemporain et se déroule sous nos yeux, même aveuglés. Quand, en plus d’être actuelle, cette traite des êtres humains concerne les enfants, le sujet est tout simplement explosif, qu’on le veuille ou non.
Explosif car cet esclavage n’a qu’un but : l’argent. Il permet assouvir les fantasmes dégoûtants (et que Dieu merci la caméra nous épargne !) de riches bourgeois bedonnants, qui, #balancetonporc, violent impunément l’innocence de leurs jeunes victimes. Cela se passerait de commentaire s’ils ne participaient pas ainsi, par leurs actes criminels, à ce sordide trafic sexuel d’enfants, avec tout ce que cela implique de criminel comme les rapts, les souffrances, les détresses et des vies à jamais brisées. C’est d’ailleurs peut-être là le seul défaut du film : pouvoir laisser penser, un court instant, que nos petits héros arrachés à cet enfer vont pouvoir reprendre leur vie d’avant, quand on sait combien il est difficile pour un enfant de se reconstruire après un tel drame que sont ces viols à répétition. D’ailleurs, combien d’autres ne seront pas sauvés et resteront à vie dans la prostitution, faute de « sauveteurs » ? Mais comme le dit le proverbe, une goutte d’eau pour éteindre l’incendie peut suffire si chacun fait sa part.
Gênant aussi, Sound of Freedom, puisque ce trafic de petits êtres humains représenterait aujourd’hui un terrible « marché » de plus de 150 milliards de dollars (*), en pleine explosion. Comme l’est aussi l’explosion de la consommation d’érotisme, de porno soft, chic, hard, ou pire encore. Comme co-fondateur de Sosporno.net, lancé en 2020 pour venir en aide aux victimes de l’addiction à la pornographie, je ne suis pas trop mal placé pour savoir ce que représente aujourd’hui cette gigantesque pieuvre du porno. Le fait est… qu’elle conduit assez souvent de simples citoyens de la « simple » consommation épisodique puis régulière de pornographie à des comportements de plus en plus addictifs, vers des contenus de plus en plus violents, sans que nous connaissions bien sûr les détails. Ces « addicts » nous en témoignent anonymement dans le chat’ bienveillant de notre plateforme. Ils nous disent combien ils souffrent d’avoir été « pris au piège » d’un terrible engrenage, d’une spirale infernale et dont il apparaît qu’ils ne peuvent en sortir qu’avec l’aide de thérapeutes addictologues. (Ou quand, plus rarement, quoi que cela se poursuit encore, survient le miracle d’une libération immédiate par la prière et l’intercession d’un bienheureux comme Carlo Acutis).
1. Les liaisons dangereuses de la prostitution des mineurs
Parfois, cette addiction au porno s’accompagne aussi d’une addiction à l’alcool et à la drogue, comme on peut le constater aussi dans Sound of Freedom. Ou comme une triste actualité récente du showbiz français a malheureusement permis d’en faire prendre conscience l’opinion : le développement du « chemsex », alliance morbide du sexe et des stupéfiants, dont l’Académie de médecine a également pointé du doigt les effets pervers dans son rapport de janvier dernier.
Rapport qui, soit dit en passant, traitait précisément de l’accès à la pornographie chez l’enfant et l’adolescent, et soulignait que le nombre de mineurs en situation de prostitution en France se situerait entre 7 000 à 10.000 enfants (dont 90% de filles et 10% de garçons). Avec une prévalence « probablement sous-estimée et bien plus élevée pour les populations migrantes, en particulier dans les départements d’outre-mer ».
Par ailleurs, affirmait ce rapport, « les statistiques du ministère de l’intérieur montrent une augmentation récente des mineurs victimes de proxénétisme (1,4) », avec un âge moyen de début autour de 15 ans (5). L’académie de Médecine rapportait également les facteurs de risque et de vulnérabilité reconnus : « des comportements sexuels à risque (…), des situations de rupture familiale et des antécédents de fugue, d’abus sexuels, de déscolarisation, des difficultés psychiatriques (consommation de toxiques, dépression…) ». Une problématique qui toucherait « tous les milieux » (1, 2, 5). Et les « sages » de la santé de pointer du doigt des nombreuses difficultés des professionnels en termes de prévention et d’accompagnement :
« Premièrement, la ‘culture porno’ sur les réseaux sociaux (…) identifiant la femme à un objet sexuel, une forme de banalisation de l’utilisation du corps via les ‘sexting’, et une image parfois trop positive en termes d’émancipation et d’accès à de l’argent ‘facile’ (5,6) ».
« Deuxièmement, les adolescents concernés ont souvent du mal à se reconnaitre comme victimes, d’autant que des techniques d’hameçonnage se sont développées sur les réseaux sociaux, ciblant les jeunes vulnérables avec la promesse initiale d’une relation amoureuse authentique ».
« Troisièmement, les quelques campagnes de prévention et les tentatives législatives pour faciliter tant l’accompagnement que les enquêtes se heurtent toujours à de nombreux non-dits et interdits. (4) »
2. Une explosion de la pornographie chez mineurs
En mai dernier, l’Arcom (ex-CSA) dévoilait les derniers chiffres de Médiamétrie témoignant d’une inquiétante augmentation du nombre de mineurs exposés à la pornographie : +36% en 5 ans. « Un phénomène massif qui s’aggrave d’année en année », affirme cette étude disponible en ligne, dont on peut relever ces trois tendances alarmantes :
2,3 millions de mineurs fréquentent des sites pornos, un chiffre en croissance rapide ces dernières années.
51% des garçons de 12-13 ans se rend sur ces sites, 65% pour les 16 et 17 ans (en moyenne 12% de l’audience des sites adultes est réalisée par les mineurs (17% sur certains sites)
près d’un mineur sur dix se rend chaque jour sur des sites à destination des adultes (contre 30% des mineurs mensuellement et 37% les adultes).
D’autre part, en Grande-Bretagne, une étude montre que 50% des agressions sexuelles perpétrées par des mineurs sont dues à l’addiction au porno, comme l’a affirmé en mai dernier la Commissaire à l’enfance du Royaume-Uni, Rachel de Souza, au Guardian. Elle a alors réclamé des mesures plus « robustes » pour protéger les enfants : « Je pense que nous avons plus que jamais des arguments en faveur de la mise en place des protections les plus solides pour les enfants en ligne. Aucun enfant ne devrait pouvoir accéder ou regarder ». Selon ses chiffres, les jeunes commencent à être addict au porno dès 13 ans et 1/10e des jeunes de 16 à 21 ans tombent dans cette addiction dès 9 ans. Des chiffres similaires en Espagne ont été évoqués… comme dans le reste de l’Europe ?
3. Un rapport sénatorial fait le lien entre pédo-prostitution et pornographie
En septembre 2022, est publié un rapport choc de 189 pages sur l’industrie du porno, ayant pour titre « L’enfer du décor ». Il dévoile l’envers du décor de l’industrie pornographie, et pointe également son lien avec les réseaux sociaux, mais aussi le proxénétisme, dont celui des enfants. Une « prostitution des mineurs » qui cache bien mal le nom de pédophilie, mais sur laquelle on peut sortir ces trois extraits très instructifs (7) :
Simon Benard-Courbon, substitut du procureur de la République, co-référent prostitution et traite des êtres humains des mineurs à la division de la famille et de la jeunesse (Difaje) du tribunal judiciaire de Bobigny, expliquait : « La pornographie en ligne a pris son envol à la même période que la prostitution des mineurs a pris son envol, pendant les années 2010. Presque tous les jeunes nés dans les années 2000 ont eu très tôt des portables leur donnant accès à des sites pornographiques – car les outils de contrôle parental sont très limités. »
Samia Bounouri, infirmière scolaire en Seine-Saint-Denis, secrétaire départementale du syndicat SNICS-FSU, précisait alors aux sénateurs : « On peut se demander jusqu’à quel point ce visionnage de vidéos pornographiques peut influencer par la banalisation et la désinhibition de certains jeunes « fragiles » qui se filment en plein acte sexuel pour diffusion via les réseaux sociaux ou autres. Nous nous interrogeons sur le lien entre cette banalisation et l’augmentation de la prostitution des mineurs. »
Thomas Rohmer, directeur de l’Observatoire de la parentalité et de l’éducation numérique (Open) ajoutait enfin : « La situation se dégrade également au regard des conduites à risques qui découlent souvent de cette immersion forcée des jeunes dans cette bulle pornographique, qui affecte fortement, comme toujours, les plus fragiles. (…) La prostitution des mineurs prend une ampleur phénoménale et inquiétante dans notre pays. »
Pour conclure, un dialogue du film Sound of Freedom illustre dramatiquement trop bien l’une des principales raisons de l’explosion de la pédophilie industrialisée :« c’est le réseau criminel international qui grandit le plus vite au monde : il a déjà dépassé les ventes d’armes illégales, et il surpassera bientôt le trafic de drogue : parce ce qu’on peut vendre un sachet de coke une fois, mais un enfant… cinq à dix fois par jour ». Alors que faire ?
Pour s’attaquer à ce fléau mondial, il faut prendre le mal à la racine, dont fait donc partie intégrante la pornographie. En luttant contre la pornographie chez les mineurs, on luttera contre la pédopornographie, contre la pédophilie et les trafics sexuels d’enfants. A nos Etats de lancer une véritable politique publique en ce sens, avec, au-delà de toute idéologie sur la sexualité, des moyens conséquents pour des mesures concrètes.
Et, pour commencer, un véritable empêchement de la consultation des sites pornos aux mineurs, qui est techniquement tout à fait réalisable, à condition d’une volonté politique, en dépit du manque à gagner que cela représenterait pour les principales plateformes de pornographie.
C’est une question d’humanité. En ce sens, parce qu’il met enfin en lumière la cause des enfants-victimes, comme un vibrant #Metoo de l’enfance, Sound of Freedom rend un service inestimable au bien commun de l’humanité. C’est un film salvateur, que tout le monde doit voir.
Et vous, qu’en pensez-vous ? Venez en discuter avec nous sur le live chat’ ! (discussion anonyme et gratuite)
(*) Chiffre évoqué par Jean-Claude Brunet, l’ambassadeur en charge de la lutte contre les menaces criminelles transnationales de la journée mondiale de lutte contre la traite des êtres humains en juillet 2022.
Champrenault C pour le groupe de travail. Rapport sur la prostitution des mineurs remis à monsieur Adrien Taquet, Secrétaire d’Etat en charge de l’Enfance et des Familles, le 28 juin 2021.
Dupont M, Pohu H, Clochiatti U, Gorgiard C. Prévalence de la prostitution des mineurs dans les pays à revenu élevé : revue de littérature. Neuropsychiatr Enf Adol 2021; 69: 17–24.
Observatoire des Violences faites aux Femme de Seine-Saint-Denis. Annexe 3. Études sur la prostitution des mineures en Seine-Saint-Denis, Ernestine Ronai éd., Violences sexuelles. En finir avec l’impunité. Dunod, 2021, pp. 203-206.
Pohu H., Dupont M., Gorgiard C. (2022). PROMIFRANCE : recherche pluridisciplinaire sur la prostitution des mineurs en France. Rapport réalisé par le Centre de Victimologie pour Mineurs.
Bulot C, Leurent B, Collier F. Pornographie, comportements sexuels et conduites à risque en milieu universitaire. Sexologies 2015; 24(4): 187-193.
Lavaud-Legendre B, Plessard C, Encrenaz G. Prostitution de mineures – Quelles réalités sociales et juridiques ?. [Rapport de recherche]
Rapport sénatorial sur l’industrie de la pornographie, « Pornographie, l’enfer du décor », des sénatrices Mmes Annick Billon, Alexandra Borchio Fentimp, Laurence Cohen et Laurence Rossignol – rapport à retrouver ici.
Depuis un an environ, plusieurs rapports officiels pointent du doigt un phénomène alarmant : l’explosion de la pornographie chez les mineurs. Etat des lieux.
Les chiffres alarmants de l’explosion de la pornographie chez les mineurs
L’addiction au porno est, de manière effrayante, en pleine explosion chez les mineurs. Ainsi, selon le rapport de l’Arcom (ex-CSA) de mai 2023 :
Ces sites sont fréquentés par 10% des internautes, quel que soit l’âge
2,3 millions de mineurs fréquentent des sites pornos, un chiffre en croissance rapide ces dernières années (+36% en 4 ans)
30% des mineurs se rendent (chaque mois) sur un site pour adultes (contre 37% pour les adultes) et 9% quotidiennement
51% des garçons de 12-13 ans sont touchés.
D’autres rapports pointent les nombreux dangers de la pornographie pour la santé et la société comme celui de l’Académie de médecine de janvier 2023 ou celui du Sénat, « l’Enfer du décor », sur le proxénétisme 2.0 et le business vertigineux de l’industrie pornographique. Ce rapport montre notamment l’importance des réseaux sociaux dans le développement du porno chez les mineurs : Réseaux sociaux et messageries privées, nouveaux vecteurs du porno.
L’addiction au porno chez les mineurs entraîne d’autres dérives : agressions sexuelles, drogues…
Plusieurs pays européens, en particulier l’Espagne ou la Grande-Bretagne, montrent aussi, chiffres à l’appui, que l’addiction à la pornographie, chez les mineurs notamment, est la cause de 50% des agressions sexuelles :”’
Ces rapports ne sont pas, pour l’instant, suivis d’effets bien qu’ils pointent les graves dérives de l’addiction à la pornographie (56% des divorces, fuite en avant vers la consommation de stupéfiants, etc.). Depuis près de trois ans, SOSPorno.net apporte une solution à ce « scandale de santé publique ».En particulier, nous sommes de plus en plus sollicités pour intervenir dans les écoles. Nous voulons donc lancer un programme d’intervention réplicable dans toute la France, en recrutant un chef de projet et en formant des parents bénévoles localement.
Et vous, qu’en pensez-vous ? Venez en discuter avec nous sur le live chat’ ! (discussion anonyme et gratuite)